Les produits défectueux, les produits non conformes : Touche pas à mon consommateur !

  1. Introduction

 

La protection du consommateur est au centre de nombreuses législations, pour la plupart issues de directives européennes[1].

Il s’agit de donner à l’utilisateur-consommateur des garanties face à un marché qui s’est développé, élargi, libéralisé ; face à des professionnels dont le seul fait de « faire commerce » suffit à les investir de diverses obligations à l’égard de leur clientèle ou des utilisateurs de ce qu’ils produisent ou commercialisent.

Cette préoccupation de protection existait déjà dans une certaine mesure dans les textes plus anciens : le défaut de conformité, la garantie des vices cachés, … sont depuis des décennies à la disposition de l’acheteur[2].

 

Si je me blesse avec mon nouveau compresseur, puis-je exercer un recours contre mon vendeur ? Si la boîte de vitesses du véhicule d’occasion acheté récemment se brise après 2 mois d’utilisation, ai-je un recours ?

Deux législations permettent de répondre à ces questions et méritent que l’on s’y attarde la loi du 25 février 1991 (ci-après Loi de 1991) qui règle les conflits opposant les utilisateurs aux producteurs de produits défectueux et la loi du 1er septembre 2004 (ci-après Loi de 2004) relative à la protection des consommateurs en cas de vente de biens de consommation, intégrée dans les articles 1649bis à 1649octies du Code civil.

Participant d’un même courant, elles peuvent se superposer mais pas toujours. Examinons-en certaines caractéristiques après quoi certaines décisions de justice illustreront le propos.

 

Précisons que, par souci de facilité, la numérotation des articles de la Loi de 2004 sera celle qui est reprise au Code civil.

 

  1. Que visent ces lois ?

La Loi de 1991 rend tout « producteur » responsable du dommage causé par un défaut de son produit[3].

Il y a « défaut » du produit lorsque celui-ci n’offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s’attendre compte tenu notamment de la présentation du produit, de l’usage normal ou prévisible qu’on peut en faire, du moment où il a été mis en circulation[4].

 

Attention : cette notion de mise en circulation peut poser question.

Si les hypothèses liées à l’entrée en vigueur de la Loi[5] ne sont probablement plus d’actualité, encore la remise pour un test a-t-elle été considérée comme ne constituant pas une mise en circulation. De même, le stockage des produits par le producteur dans ses propres installations, sans volonté de se dessaisir du produit pour le transférer à un tiers, permet au producteur de s’exonérer de sa responsabilité : il n’y a pas dépossession volontaire[6].

 

Toute personne lésée par un « produit » ne doit, pour obtenir réparation de son dommage, qu’apporter la preuve du défaut de ce produit et du lien de causalité entre ce défaut et son dommage ; elle n’a pas à prouver une faute du producteur[7].

Elle n’a pas non plus à établir qu’un contrat la liait au producteur.

 

 

 

La Loi de 1991, en s’ajoutant aux bases légales existantes, a créé une hypothèse de responsabilité sans faute et le producteur, défini de manière large à l’article 3 de la Loi[8], ne pourra s’en  exonérer que sous de strictes conditions énumérées à l’article 8[9].

Cette loi autorise par ailleurs toute personne lésée par un ‘produit’ à donner plusieurs fondements à sa demande en réparation et d’assigner le producteur non seulement sur la base de cette loi mais aussi sur la base du droit commun de la responsabilité, contractuelle (art.1641 et suivants du Code civil relatifs au vice caché, et 1649bis et suivants pour les biens de consommation à l’égard du vendeur – il va en être question) ou extracontractuelle (article 1382 et suivants du Code civil).

La loi de 2004 concerne précisément le recours du consommateur à l’encontre du vendeur par rapport au bien de consommation qu’il a acquis.

Le point de départ de la Loi requiert l’existence d’un contrat liant le consommateur (et plus  l’utilisateur) au vendeur (et plus le producteur) concernant un bien de consommation.

Comme évoqué ci-dessus, un parallèle peut être fait avec le « produit » évoqué dans la loi de 1991 mais la symétrie n’est pas complète : sont également visés les « simples » défauts de conformité qui, impliquant ou non un dommage, peuvent engager la responsabilité du vendeur.

 

A noter le cas de l’électricité, retenue comme produit défectueux potentiel dans la loi de 1991 mais exclue des biens de consommation par la loi de 2004[10].

 

Et s’il était question de sécurité (ou d’absence de sécurité) du produit causant un dommage dans la loi de 1991, il est ici question d’une absence de conformité ouvrant le droit à un recours, outre les éventuels dommages et intérêts.

Le champ d’application s’en trouve modifié.

Plus restreint en ce qu’il ne vise que les parties au contrat[11] et impose d’agir ou de réagir dans certains délais[12].

Plus large en ce qu’il vise différents mode de réparation, soit une diminution du prix, la réparation, le remplacement du produit défectueux lui-même outre des dommages et intérêts[13].

 

Il faut également relever l’approche contraignante pour le vendeur professionnel, tant à la délivrance que durant la garantie.

A la délivrance d’abord :  si le consommateur doit assumer sa connaissance préalable du bien et son éventuel défaut préalable[14], encore le bien de consommation n’est-il réputé être délivré par le vendeur dans un état de conformité que s’il répond à différentes conditions, et notamment la qualité à laquelle le consommateur peut raisonnablement s’attendre pour un bien de cette nature au vu, par exemple, de la publicité qui en a été faite[15]. Le caractère contraignant de la publicité faite pour le bien est légalement établi.

Au titre de garantie ensuite : l’article 1649septies détermine la forme et le contenu de la garantie qui doit être délivrée par le vendeur du bien de consommation. La non-conformité formelle d’une garantie au texte de loi (par exemple en ce qu’elle réduirait le délai fixé par la loi durant lequel le vendeur peut être valablement interpelé) ne peut porter préjudice au consommateur.

 

  1. Quels sont les biens visés ?

Le produit est défini par la loi de 1991 comme étant « tout bien meuble corporel, même incorporé à un autre bien meuble ou immeuble, ou devenu immeuble par destination ».
La distinction opérée classiquement en droit des biens est donc sans incidence.
Font également partie des produits : les denrées alimentaires, les médicaments et vaccins, les produits de l’agriculture, de l’élevage, de la chasse et de la pêche ainsi que l’électricité (responsabilité du distributeur pour survoltage ou sous-voltage, variations ayant causé des dommages aux biens du consommateur).
La loi de 2004 vise de manière large « tout objet mobilier corporel »[16] mais exclut toutefois les biens vendus sous autorité de justice, l’eau et le gaz lorsqu’ils ne sont pas conditionnés de façon délimitée et, comme déjà précisé, l’électricité.

 

  1. Qu’entend-on par ‘producteur’ ou ‘vendeur’ ?

La loi de 1991 renseigne comme producteur le fabricant du produit fini, le fabricant d’une partie composante du produit fini, le producteur d’une matière première et l’importateur d’un produit fabriqué en dehors de la communauté européenne.

La responsabilité du fournisseur (grossiste, détaillant ou franchisé) qui est le dernier maillon de la chaîne de fabrication et de distribution peut être engagée mais celui-ci peut échapper à toute responsabilité s’il livre le nom du fabricant ou de l’importateur.

 

La loi de 2004 opère une distinction : le vendeur est défini comme la personne qui vend des biens de consommation dans le cadre de son activité professionnelle ou commerciale tandis que le producteur est la personne qui fabrique le bien de consommation, l’importe dans l’UE ou, plus généralement, qui se présente comme producteur en apposant sur le bien de consommation son nom, sa marque ou un autre signe distinctif.

Ces deux personnes peuvent n’être qu’une.

Si s’agit de deux personnes différentes, seul le vendeur est susceptible d’être interpelé par le consommateur.

Mais le producteur peut alors devoir répondre de l’éventuel recours qu’exercerait contre lui le vendeur chargé de répondre de la non-conformité du bien,  sans que ce producteur puisse faire valoir une clause contractuelle ayant pour effet de limiter ou d’écarter sa responsabilité.
Une distinction est donc à opérer : là où le vendeur du produit défectueux pourra échapper à toute responsabilité en communiquant le nom du producteur, il n’en sera pas de même dans le cadre de la vente d’un bien de consommation : le vendeur devra d’abord en répondre à l’égard du consommateur pour ensuite exercer son recours contre son cocontractant, soit éventuellement le fabricant.

 

  1. Quels sont les dommages que les lois indemnisent ?

C’est un point de divergence important entre ces deux législations.

 

La loi de 1991 vise, à titre principal, à indemniser les dommages causés aux personnes (honoraires médicaux, frais d’hospitalisation, dommages financiers découlant du décès ou de la survenance d’une incapacité), y compris les dommages moraux.

A titre subsidiaire, sont également visés les dommages causés aux biens (avec une franchise de 500 €), à l’exclusion des dommages causés au produit défectueux lui-même. L’indemnisation de ce dommage relève de la garantie des vices cachés ou de la garantie légale des biens de consommation consacrée par la loi du 1.9.2004.

Cette absence de prise en charge de la contrevaleur du produit défectueux peut être déterminante pour choisir le fondement légal.
La loi de 2004 vise précisément à (re)mettre à disposition du consommateur  le bien dont il a fait l’acquisition, le cas échéant pour un prix correspondant à l’état de ce bien.

L’article 1649 quinquies met à charge du vendeur, dans un  premier temps,  la réparation ou le remplacement du bien. Dans un second temps, et si la réparation ou le remplacement n’est pas envisageable, le consommateur a droit à une réduction adéquate du prix ou encore à la résolution du contrat.

Les limites sont, au bénéfice du vendeur, la disproportion qui existerait entre le coût de la réparation et/ou du remplacement et la valeur du bien et, au bénéfice du consommateur, l’absence d’inconvénient majeur que peut générer la mesure envisagée.

Des dommages et intérêts peuvent être postulés mais ce n’est pas l’objectif premier de la disposition[17].

 

  1. Exonération du producteur

Le principe des deux législations est le même : il ne peut a priori être question pour le producteur et/ou le vendeur de s’exonérer de sa responsabilité par des clauses limitatives de sa responsabilité. Le libellé de l’article 10 §1 de la loi de 1991 est clair : la responsabilité du producteur ne peut être limitée ou écartée à l’égard de la victime par une clause limitative ou exonératoire de responsabilité.

De même, l’article 1649octies stipule que sont nuls les clauses contractuelles ou les accords conclus avant que le défaut de conformité ne soit porté à l’attention du vendeur par le consommateur et qui, directement ou indirectement, écartent ou limitent les droits accordés au consommateur.

 

Les exonérations sont donc de stricte interprétation.

 

Outre les hypothèses d’exonération déjà visées à l’article 8[18], s’il est interdit au producteur de se soustraire à sa responsabilité par une clause limitative ou exonératoire de responsabilité, la loi de 1991 lui permet de s’exonérer partiellement ou totalement de sa responsabilité lorsqu’il apporte la preuve que le dommage a été causé conjointement par un défaut du produit et par la faute de la victime ou d’une personne dont la victime est responsable.

 

Outre la connaissance que le consommateur avait ou devait avoir du défaut et qui peut alléger la responsabilité à assuer, la loi de 2004 confère au vendeur une action récursoire contre le producteur ou ses intermédiaires contractuels[19]. Précisons que les délais fixés légalement et auxquels le consommateur doit se tenir pour agir ou réagir à l’encontre du vendeur sont également de nature à décharger le vendeur de sa responsabilité.

 

  1. Délais impartis pour introduire une action contre le producteur

L’article 12 de la loi de 1991 renseigne, dans ses deux paragraphes, deux délais dont il faut tenir compte.

D’abord, le paragraphe 1 précise que le droit de la victime d’obtenir réparation de son préjudice s’éteint à l’expiration d’un délai de 10 ans à compter de la mise en circulation du produit.

Ensuite, le paragraphe 2 fixe à 3 ans le délai pour agir sur base des dispositions de la loi à compter du moment où la victime a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance du défaut, du dommage et de l’identité du producteur.
La loi de 2004 consigne à l’article 12 les différents délais à prendre en considération.

Le vendeur doit répondre du défaut de conformité lors de la délivrance ou du défaut de conformité qui apparaîtrait dans un délai de 2 ans à dater de celle-ci. Deux précisions : d’une part, ce délai est suspendu pendant la réparation ou le remplacement du bien ou encore lorsque les parties négocient ; d’autre part, le consommateur dispose d’un délai d’un an pour agir sans que ce délai puisse expirer avant le délai de 2 ans évoqué ci-dessus.

La loi établit en outre une présomption : un défaut de conformité apparaissant dans les 6 mois de la délivrance est présumé exister au moment de cette livraison.

Deux inflexions contractuelles sont admises :

– les parties peuvent raccourcir le délai de 2 ans à condition qu’il soit au moins égal à un an

– les parties peuvent convenir d’un délai endéans lequel le consommateur doit avertir le vendeur du défaut de conformité à condition que ce délai soit au moins égal à deux mois

 

  1. Assurance

Dans le cadre de la loi de 1991, victime d’un produit défectueux, le consommateur veillera à mettre en cause, s’il existe, l’assureur R.C. Exploitation du ‘producteur’ et celui du ‘fournisseur’, soit sur la base de la loi du 25 février 1991, soit sur la base des règles de droit commun (art.1641 et suivants du Code civil et art.1382 et suivants du même Code).

 

Les hypothèses de prise en charge par un assureur dans le cadre de la loi de 2004  peuvent être plus rares, s’agissant d’un litige de nature contractuelle, ce qui écarte l’application des assurances RC exploitation (mais rentre par contre dans le champ d’application des assurances RC après livraison).

 

  1. Quelques applications jurisprudentielles
  • Ont été reconnus comme responsables sur la base de la loi du 25 février 1991 :

 

Le fournisseur intra U.E. d’un sèche-linge (fabriqué en Asie) qui a pris feu au niveau de la prise de courant, occasionnant un incendie avec des dégâts matériels importants. Le vendeur du sèche-linge a été tenu à la contre-valeur du sèche-linge avec un recours pour le tout à l’encontre du fournisseur.

(Commerce Liège, 24 octobre 2016, inédit)
Commentaire : l’action aurait pu également être diligentée sur pied de l’article 1649quinquies à condition que l’incendie soit survenu dans un délai de 2 ans à dater de la vente. La contrevaleur du sèche-linge aurait été obtenue, outre les dommages et intérêts liés aux dommages causés par le feu.
Le producteur et l’importateur d’un vélomoteur dont la fourche s’est brisée en raison d’un défaut de serrage des vis d’assemblage, occasionnant ainsi la chute de son conducteur qui, en tombant, a percuté une voiture en stationnement

(Appel Liège 18.10.2004)
Commentaire : sous la même condition de respect du délai, l’article 1649quinquies aurait pu être invoqué à l’encontre de l’importateur.

 

Le caractère défectueux d’un produit au sens de la loi du 25 février 1991 relative à la responsabilité du fait des produits défectueux n’implique pas nécessairement une faute au sens de l’article 1382 C. civ. Dans le cadre de la loi précitée, il est en effet question d’une responsabilité sans faute ou objective.

(Police Anvers (div. Turnhout), 22.03.16)

Commentaire : la faute ne doit pas être prouvée ce qui illustre l’avantage d’avoir assigné sur pied de la loi de 1991.
Le distributeur d’électricité pour surtension du réseau électrique.

(Appel Gand 24.5.2002 et Cass.6.4.2006).

Commentaire : le défaut de conformité n’aurait pas pu être évoqué, l’électricite étant exclue de la définition du bien de consommation
Le fabricant de bouteilles de limonade dont l’une a explosé dans les mains d’un consommateur, même si les bouteilles sont fournies par un sous-traitant (Appel Anvers 10.1.2000)

Commentaire : solution à nuancer en fonction du moment où est survenu l’accident (hypothèse d’un sinistre proche de l’entrée en vigueur de la loi où son application a été refusée).

Le fabricant d’une citerne dont la paroi interne, présentant des défauts d’étanchéité, a laissé l’eau se mélanger au mazout

(Appel Bruxelles 8.2.2010)

Commentaire : à ne pas confondre avec les hypothèses, plus fréquentes, de débordement(s) en raison d’un manque d’attention du livreur ou d’une défaillance du système de prévention (évent ou sonde).
Le fabricant d’un appareil dentaire dont le système de fixation au moyen d’élastiques a causé des blessures à l’œil de l’enfant qui l’a manipulé imprudemment.

(Cass.26.9.2003)

 

Commentaire : se pose la question d’un partage de responsabilité en application de l’article 10 §2 de la loi de 1991.

 

 

  • N’ont pas été reconnus responsables sur la base de la loi du 25 février 1991 :

Citroën Belux S.A. pour les brûlures aux jambes occasionnées par un airbag fabriqué par un producteur identifiable dans un autre Etat membre de la Communauté européenne

(Appel Bruxelles 16.1.2012)

Commentaire : illustration de la différence existant entre le régime d’indemnisation de chacune des lois. Le producteur, identifié, peut être interpelé directement par la victime là où le vendeur sera automatiquement interpelé (avec un éventuel recours) dans le cas du défaut de conformité d’un bien de consommation.

Le fabricant et le distributeur d’un produit de débouchage à base d’acide sulfurique ayant provoqué, lors de son utilisation, de graves brûlures chez un consommateur n’ayant pas pris les mesures de prévention recommandées sur le bidon

(Appel Liège 25.10.2011)

Commentaire : illustration de l’exonération dont bénéficie le producteur en cas de faute de la victime, outre le ‘défaut’ – par ailleurs relatif, s’agissant d’acide sulfurique – du produit.
L’hôpital qui a utilisé, lors d’une intervention chirurgicale, un matelas chauffant ayant causé des brûlures au patient, seul étant responsable le fabricant de ce matelas

(Cour justice Communauté européenne 21.12.2011).

Commentaire : au même titre que CITROEN Belux, illustration du fait que le producteur peut être directement interpelé.

 

  • Ont été reconnus comme responsables sur la base des articles 1649bis et suivants du Code civil :

 

Le vendeur professionnel d’une voiture d’occasion est tenu d’accorder un délai de garantie de deux ans à partir de la livraison puisqu’aucun délai plus bref (d’un minimum d’un an) n’a été convenu. Les clauses contractuelles ou les accords conclus avant que le défaut de conformité ne soit porté à la connaissance du vendeur par le consommateur et par lesquels les droits du consommateur sont directement ou indirectement limités ou exclus sont nuls en application de l’art. 1649octies C.civ. Une clause qui exclut toute garantie et qui, par conséquent, limite sérieusement les droits du consommateur ne peut déployer de conséquences juridiques.

(Cass., 17.03.16)

Commentaire : illustration de la protection offerte par la législation, malgré les clauses contractuelles limitant ou exonérant le vendeur de toute responsabilité. A noter que la limitation à une durée d’un an de la garantie aurait pu être prévue mais ne l’a pas été.

 

Lorsque la chose vendue est affectée d’un défaut de conformité, le consommateur a le droit d’exiger du vendeur une réduction adéquate du prix ou la résolution du contrat de vente si le vendeur n’a pas effectué la réparation ou le remplacement dans un délai raisonnable ou sans inconvénient majeur pour le consommateur. Tel est le cas lorsque le vendeur n’a pas procédé aux réparations alors qu’il était mis en demeure de le faire par l’acheteur et n’a même jamais répondu aux lettres circonstanciées de celui-ci et que faire droit à l’offre formulée par le vendeur dans le cadre de la procédure judiciaire présenterait un inconvénient majeur pour l’acheteur qui dit avoir racheté un autre véhicule pour procéder à ses déplacements. Le vendeur est tenu à la restitution du prix d’achat, au remboursement des frais payés par l’acheteur et à une indemnisation pour la période de chômage. (Art. 1649quater C.civ.).

(Liège, 28/05/2009)

 

Commentaire : le vendeur d’un bien non conforme doit faire preuve de proactivité pour résoudre le problème rencontré. A défaut, le consommateur est autorisé à exiger que lui soit infligée une sanction plus lourde (résolution du contrat plutôt que réparation).

 

Le vendeur d’un contour en teck pour une piscine autoportante a été condamné à indemniser l’acheteuse. Celle-ci s’est fracturée un pied lorsque la marche de ce contour sur laquelle elle a mis le pied a cédé. Elle a obtenu la condamnation du vendeur au remboursement du prix payé pour le contour (n’ayant fait preuve d’aucune proactivité pour proposer une réparation ou un remplacement), outre l’indemnisation de son préjudice corporel. Le vendeur a par ailleurs bénéficié d’une action en garantie contre son propre fournisseur intra U.E. à concurrence de la valeur du contour.

(Civ. Liège, division Huy, 29.10.15, inédit)

 

Commentaire : application classique de la réglementation si ce n’est que l’indemnisation du préjudice corporel est d’un montant très sensiblement supérieur au prix du contour. A noter que l’assureur du vendeur est intervenu (assurance RC après livraison) et que le tribunal a eu égard à la réduction de prix que le vendeur avait consentie pour ne prononcer condamnation qu’à due concurrence.

 
En guise de conclusion, nous pouvons dire que les dispositions des lois des 25 février 1991 et 1er septembre 2004 (biens que qu’intégrées pour ces dernières dans le corps même du Code civil) sont d’un apport non négligeable dans le domaine de la défense des droits des utilisateurs et des consommateurs.

Leur usage demeure pourtant relativement peu fréquent et nombre de décisions rendues se rattachent encore et toujours aux principes classiques de responsabilité, tant contractuelle qu’extra-contractuelle.

Même si elles n’ont pas vocation à exclure ou remplacer l’application de ces dispositions classiques du Code civil tels les articles 1382-83 permettant de mettre en cause la responsabilité du producteur, l’article 1384 al.1 relatif au vice de la chose ou encore les articles 1641 et suivants concernant la garantie des vices cachés affectant la chose vendue, elles peuvent être d’une aide précieuse pour éviter le débat, souvent aléatoire, relatif à la faute qui aurait été commise par le producteur ou le vendeur.

Paul SCHILLINGS

[1] La loi du 25 février 1991 adopte le droit belge à la Directive du 25 juillet 1985 (JOCE, 1985, L210/29, RGAR, 1987, n°11245. Les articles 1649 et suivants du Code civile transoposent la directive 1999/44/CE du Parlement européen et du Conseil du 25 mai 1999 sur certains aspects de la vente et des garanties des biens de consommation.

[2] Le Chapitre IV du Titre VI du Code civil relatif à la vente consacre les différentes obligations du vendeur

[3] Article 1 de la Loi de 1991

[4] Article 5 de la Loi de 1991

[5] Entrée en vigueur le 1er avril 1991

[6] Cour d’appel de Mons, 7 février 2013, 2011/RG/909

[7] Article 11 de la Loi de 1991: le dommage aux personnes est indemnisé ainsi que le dommage aux biens sous déduction d’une franchise de 500 EUR mais les dommages causés au produit défectueux ne donnent pas lieu à indemnisation

[8] Producteur, importateur intra Union Européenne, fournisseur

[9] Article 8 : exonération s’il n’a pas mis le produit en circulation ; si le défaut n’existait pas au moment de cette mise en circulation ; que le produit n’a pas été fabriqué pour le vente ; que le défaut est du à la conformité à des règles impératives ; que l’état de la connaissance scientifique ne permettait pas de déceler le défaut ; que la conception du produit dans son entièreté était déficiente sans défaut du produit le composant

[10] Article 2 alinéa 2  de la Loi de 1991 par opposition à l’article 1649bis §2.3° in fine

[11] Article 1649bis, §2, 1° et 2°

[12] Article 1649 quater

[13] Article 1649 quinquies de la Loi de 2004

[14] Article 1649ter §3

[15] Article 1649ter, §1.4°

[16] Article 1649bis §2.3°

[17] Article 1649quinquies §1 : « Outre des dommages et intérêts le cas échéant, le consommateur a le droit d’exiger… »

[18] Voir note n°9

[19] Article 1649sexies